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La conquête du pouvoir en Afghanistan par les talibans, après une offensive éclair et la chute de Kaboul sans combat, semble prendre tout le monde par surprise. Les talibans ont repris les rênes du pays, vingt ans après en avoir été chassés et multiplient les gestes d’apaisement. Ont-ils donc changé ? Il suffit déjà d’observer la réaction des Afghans, les principaux concernés. Car passé la sidération devant le retour en vainqueurs des Talibans et surtout le spectacle pathétique de la formidable débandade de leur armée censée défendre leurs villes et leurs régions puis, coup de grâce, la fuite du président Ashraf Ghani, des centaines de milliers d’Afghans n’ont pas attendu et se sont lancés à corps perdu vers l’exode aux frontières pakistanaises, tadjiks, iraniennes ou encore devant les murs d’enceinte de l’aéroport de Kaboul, dont les images terribles ont fait le tour du monde. Car la majorité en Afghanistan est convaincue que le millésime taliban 2021 n’a que peu de différence avec le millésime 1996 où ils ont régné par la terreur, et ce en dépit des apparences. Mais pourtant, on parle d’amnistie générale, de retour à la paix et même de « gouvernement inclusif » ? Moins d’une semaine après leur arrivée triomphante dans les rues de Kaboul, les incidents se multiplient aux quatre coins du pays. L’aéroport militaire de Kaboul, sécurisé par les Marines américains le temps du pont aérien d’évacuation, est encerclé par des combattants talibans de plus en plus agressifs face aux milliers de familles agglutinées sur la Porte Nord. Un rapport de sécurité des Nations Unies révèle que des miliciens font désormais du porte-à-porte, liste en mains, pour traquer activistes ou anciens collaborateurs de l’ONU ou d’ambassades... En attendant le retour prochain de leur guide spirituel le Mollah Hakundzada, les talibans savent qu’ils ont vaincu la première armée du monde et sont en pleine puissance. Aussi, les promesses d’inclusivité et d’amnistie n’engagent plus aujourd’hui que ceux à qui ils les ont faites. Communauté internationale en ordre dispersé Entre déroute et évacuation anarchique mais aussi attentisme ou même engagement, la communauté internationale et les pays de la région avancent en ordre dispersé face aux nouveaux talibans. Il y a vingt ans, seuls le Pakistan, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis avaient reconnu le régime taliban. Le vrai changement aujourd’hui vient du regard, pragmatique ou cynique, que porte l’étranger sur le futur Émirat islamique d’Afghanistan. Outre leur colossale percée idéologique, les talibans ont entre les mains un trésor de ressources naturelles qui attire toutes les convoitises. Et les amitiés, de Moscou à Téhéran, en passant par Ankara et bien sûr Pékin, qui y verrait bien, là aussi, une opportunité de plus de renverser les codes traditionnels d’une mondialisation dominée par l’Occident.