Le monde en questions - L’avancée fulgurante des talibans en Afghanistan: à quand la chute de Kaboul ?

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Nous revenons sur la progression qui semble inexorable des talibans en Afghanistan. Comment expliquer cette poussée talibane que rien ne semble pouvoir arrêter ? La réponse est forcément multiple, tant les causes expliquant cette offensive victorieuse des talibans résulte de plusieurs facteurs qui se conjuguent et assurent aux insurgés cet avantage foudroyant qui leur ouvre désormais la route vers Kaboul. Il faut d’abord rappeler que ces talibans, défaits très rapidement en 2001 par les Américains parce qu’ils refusaient de leur livrer Oussama Ben Laden, se sont dans un premier temps replié dans leurs bastions pachtounes du Sud afghan. Ils ont patienté, retissant les liens et leur influence dans de nombreuses zones rurales, assurant une forme d’aide sociale à des populations démunies et oubliées du pouvoir central. Et ils ont peu à peu retrouvé leur influence politique et militaire. Quand les Occidentaux, et surtout les Américains, ont entamé une forte réduction de leur présence sur place à partir de 2014, les talibans ont repris du poil de la bête. Du coup, au moment de l’annonce du retrait américain par Donald Trump, retardé mais confirmé par Joe Biden, les talibans, tout en faisant semblant de parler de l’avenir politique du pays à Doha, avaient déjà récupéré pas loin de la moitié du territoire national lorsque le retrait américain a effectivement débuté. Et donc, ils ont entamé en mai leur offensive avec déjà de solides bases derrière eux. Autre explication de cette stratégie victorieuse, la diversification : très présents chez les Pachtounes, l’ethnie principale en Afghanistan, les Talibans ont su séduire aussi dans les populations du nord de pays, chez les Ouzbeks et les Tadjiks. Cela explique en partie leurs succès inédits dans cette partie du pays, d’où ils étaient absents - même durant leur période au pouvoir à la fin des années 1990. On peut aussi expliquer la fulgurance de l’avancée actuelle des talibans par la faible motivation en face de l’armée afghane. Une armée qui pourtant a été modernisée, professionnalisée depuis des années, avec le soutien des Américains notamment. Ces derniers, à qui cela a coûté très cher, trouvent d’ailleurs que ces soldats afghans devraient mieux et plus se battre. De son côté, le président afghan Ashraf Ghani estime insuffisant le soutien aérien promis par Washington pour aider son armée à contrer les talibans. Enfin, les talibans ont compris que les Occidentaux n’allaient pas mourir pour Kaboul. La communauté internationale condamne l’action des talibans, les prévient qu’ils seront isolés sur la scène mondiale s’ils reprennent le pouvoir par la force, menace de stopper les aides financières. Mais c’est tout – et c’est peu. La question maintenant est de savoir combien de temps la capitale Kaboul peut tenir face à l’avancée des talibans. À voir l’agitation des Occidentaux, le temps semble compté pour le gouvernement afghan : les Américains ont ainsi annoncé l’envoi de 3 000 soldats à Kaboul, mais uniquement pour évacuer leurs ressortissants encore présents. Les Britanniques font de même et les pays de l’Otan devraient leur emboîter le pas, en protégeant l’aéroport de Kaboul pour mener à bien cette opération d’évacuation. Une fois partis, ils laisseront le champ libre aux talibans qui pourront, s’ils le veulent, lancer l’assaut final sur Kaboul.